A quoi ressemblait Jules César ? |
Son visage révélé en 3D.
En octobre 2007, des archéologues français découvraient au fond du Rhône à Arles ce qui semble être le plus vieux buste de Jules César, fondateur de la ville en 46 avant J.-C. Peut-être l’unique représentation du dictateur romain faite de son vivant. Onze ans plus tard, à l’occasion de la sortie d’un livre sur les campagnes militaires organisées par Jules César aux Pays-Bas, l’écrivain Tom Buijtendorp et l’anthropologiste Maja d’Hollosys dévoilent les traits du général romain. Surprenant.
Le buste de Jules César découvert à Arles en 2007.
La technologie au service de l’Histoire
Pour la réalisation de la tête du chef romain, la spécialiste de la reconstruction faciale Maja d’Hollosy et Tom Buijtendorp se sont surtout inspirés de deux bustes en marbre qu’ils ont scannés en 3D. L’un est conservé au Rijksmuseum van Oudheden. L’autre, découvert en Italie à Tusculum en 1825, est visible au Museo di Antichità de Turin. Ce dernier est considéré par les historiens comme l’un des plus fidèles du chef politique et militaire. Mais comme le nez et le menton sont abîmés, les auteurs ont recoupé les parties manquantes en faisant référence à l’autre buste et se sont aussi aidés de représentations frappées sur les pièces de monnaie de l’époque.
De gauche à droite :
Pour plus d’authenticité, la reconstruction a été faite d’argile et de silicone. Jules César a désormais un visage, mais loin des représentations qui nous sont parvenues du musée national des antiquités de Leyde ou du buste du Musée l’Arles antique. Le résultat invalide en effet quelques mythes : c’est le cas de sa chevelure, moins garnie que celle qui lui a été attribuée par certains historiens, ou de ses petits yeux perçants, moins impressionnants que ceux décrits par les livres faisant le récit de ses aventures. Impossible bien sûr d’affirmer avec certitude que c’est vraiment à cela que ressemblait Jules César. Mais les deux créateurs affirment ne rien avoir changé par rapport aux modèles en marbre. Les chercheurs ont volontairement cherché à imprimer une expression neutre sur le visage. « Je ne voulais pas qu’il ait l’air heureux et sympathique, c’est un général qui a laissé derrière lui beaucoup de cadavres », explique Maja d’Hollosys. « Il tombe un peu de son piédestal maintenant », ironise l’archéologue. « Il a l’air moins héroïque ».
Reconstruction faciale par Maja d’Hollosy – Faculty of Humanities, University of Amsterdam.
La Reconstitution en trois dimensions du visage de Jules César. Le crâne a une allure anormale. © Maja d’Hollosy, Musée national des antiquités de Leiden @IFLScience et @TrustMyScience.
Le premier aspect qui frappe en découvrant ce portrait en trois dimensions du chef romain est la forme proéminente de son crâne. « Ce n’est pas quelque chose que l’on a inventé », explique Tom Buijtendorp, « d’après les médecins, c’est une déformation qui peut se produire lors d’un accouchement difficile ». Est-elle due à un accouchement difficile ? Pas sûr. D’ailleurs, l’idée qu’il soit né par césarienne est controversée. Ce ne serait qu’une légende car, selon plusieurs témoignages, sa mère Aurelia aurait vu son fils grandir, or les césariennes se pratiquaient surtout lorsque la mère était décédée ou mourante. Ces déformations ont pu être créées lors de l’accouchement par une pression des mains. La question reste ouverte. En tout cas, explique Tom Buijtendorp, cette particularité osseuse n’est certainement pas née de l’imagination des artistes, d’autant plus que la mode était au portrait réaliste.
Jules César superstar
L’universitaire et spécialiste en Histoire romaine François Richard explique là-dessus qu’« un visage instruit sur la psychologie des gens ». C’est à la Renaissance, avec l’apparition des historiens de l’Art, que commencent les discussions autour des représentations les plus fidèles de Jules César. « Au XIXème siècle, l’Italien Bernoulli inventoria quelque 60 bustes de l’imperator. » Plus récemment, en 1967, seuls neuf ont été retenus par le Danois Johansen comme ayant été réalisés en un temps proche de celui de César. »
Très fort décidément ce Julius : 2 062 ans après son trépas, il déclenche toujours des batailles ; d’experts sans doute, mais aussi et de façon plus ludique, avec l’entrée en jeu de la numérisation et de l’impression 3D. C’est ce que le Musée Départemental Arles Antique a bien compris en proposant des répliques imprimées du buste antique retrouvé lors de fouilles dans le Rhône : de toutes les couleurs, de toutes les tailles et en diverses matières.
L’imprimante en action au Musée Départemental Arles Antique (MAPA).
Enfin et pour d’autres, la « trombine » de César restera ad vitam aeternam celle des bandes dessinées d’Uderzo, semble-t-il inspirée du buste du Vatican.